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30/04/2010

(UK) Ashes to Ashes : series 3, episode 4

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Adoptant une tournure moins introspective et personnelle que les deux précédents, ce quatrième épisode renoue avec une thématique chère à la franchise de Life on Mars : les dynamiques internes aux forces de police. Entre officiers corrompus, agents infiltrés et police des polices pressante, l'équipe de Gene Hunt expose les faux-semblants dans une intrigue assez dense et plutôt prenante.

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L'intrigue du jour va être déclenchée par une policière infiltrée, qui va de voir assigner une double fonction narrative : elle permet à Chris de poursuivre son processus d'émancipation, tout en offrant un parallèle métaphorique troublant au personnage d'Alex.

Tout débute lors d'une interpellation de trafiquants de drogue. Gene tombe alors sur une jeune femme, présente avec les délinquants, mais qu'il laisse partir peu subtilement car il s'agit d'un officier de police. Une mission d'infiltration dans son district, sans qu'il en soit informé, voilà une façon des plus efficaces d'attirer l'attention de Gene Hunt. La cible de cette opération se révèle être une famille de trafiquants notoires. Insatisfait de la gestion qui en est  actuellement faite, Gene s'approprie l'enquête en l'état. Pas déplaisante à suivre, l'intrigue policière se révèle cependant encore une fois des plus prévisibles : au milieu d'une concurrence inter-familiale dangereuse, des policiers corrompus troublent un peu plus les lignes, complexifiant les enjeux. Plus que le fait de parvenir à mettre hors d'état de nuire les criminels, l'épisode se concentre sur le sort de la policière infiltrée.


Oubliée par sa hiérarchie qui lui fournit une assistance minimale insuffisante, elle s'est retrouvée livrée à elle-même dans un milieu dangereux, où le moindre faux-pas pouvait se révéler fatal. Au bout du rouleau, l'arrivée de l'équipe de Gene dans son enquête accroît les turbulences de son quotidien mouvementé. Agressée par son patron, sans repère, elle se tourne vers la nouvelle équipe en charge avec l'espoir apparent qu'ils réussissent à la faire sortir de là et mettent fin à ses obligations. Dans cette optique, elle joue sur plusieurs registres, mettant notamment en scène une figure de demoiselle en détresse des plus convaincante qui lui permet d'attirer l'attention de Chris avec lequel elle noue rapidement des liens. Le jeune policier, toujours serviable, semble avoir une certaine forme de fascination pour ce que symbolise sa collègue. Mais dans cette policière forte, femme d'action à ses heures, c'est en réalité l'image de Shaz qui se superpose et que Chris poursuit. Car l'ancien couple continue une relation qui se cantonne à une amitié platonique, mais qui ne paraît satisfaire aucun des deux. Le téléspectateur a plutôt l'impression qu'une force irrésistible les pousse l'un vers l'autre.
J'espère que la fin de la saison nous offrira une conclusion autre que ce jeu du chat et de la souris.

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Reste que pour le moment, la policière infiltrée réveille en Chris son côté le plus sombre. Exploitant son sentiment de frustration, conséquence de son impuissance à pouvoir protéger les femmes chères à son coeur, elle le conduit à tabasser un des pontes de la bande qu'ils traquent, alors que ce dernier est enfermé dans une cellule au commissariat. Gene étant forcé d'ordonner l'appel d'une ambulance, la police des polices met logiquement la main sur l'affaire, Keats s'immisçant, avec son air supérieur, dans cette gestion humaine catastrophique, semblant prêt à sacrifier Chris et sa carrière, tel un simple pion, pour atteindre et déstabiliser Gene. L'action de Keats ne se limite d'ailleurs pas, au cours de l'épisode, à cette seule intéraction. Outre errer dans les couloirs du poste de police, prompt à sermonner l'équipe dès que quelque chose tourne mal, il donne l'impression d'être de plus en plus omniprésent pour délivrer ses vérités sur la situation présente, mais aussi entretenir des rapports, plutôt cordiaux, avec tous les membres de l'équipe, sauf, évidemment, Gene qui demeure une proie.

L'autre parallèle symbolique permit par la policière infiltrée est celui que le téléspectateur dresse instinctivement entre cette situation compliquée d'infiltrée et ce à quoi Alex doit faire face. L'immersion brutale dans un univers aux valeurs entièrement différentes, sans repère... De la police au plongeon sans filet dans le milieu des criminels, du présent jusqu'aux années 80s. Les choix qui s'offrent à elles ne sont finalement pas si différents ; et il est aisé de comprendre pourquoi Alex parait également se prendre d'affection pour la jeune femme. Sans soutien, découverte, cette dernière va finalement passer de l'autre côté de la barrière, et embrasser cette nouvelle vie pour survivre, tombant sous le charme du patriarche, l'ancien chef des trafiquants. Est-ce si différent d'Alex ? Son rapport avec les années 80 se fait chaque jour plus intense et plus concret. Elle a intégré toutes les données de cet univers pour s'y fondre. Elle demeure fascinée par son supérieur, tout en s'en méfiant. Les ressemblances ne sont pas seulement métaphoriques. Keats ne s'y trompe d'ailleurs pas. S'intéressant particulièrement à la policière infiltrée, il lui délivrera un discours, rempli d'ambiguïtés, sur l'ajustement difficile exigé dans ces situations où on se retrouve projeté dans ce qui semble un autre monde... Il est par moment difficile de savoir si c'est bien à son interlocutrice officielle, et non à Alex, qu'il s'adresse, tant ses propos conviendraient aux deux.

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Sur un plan mythologique, la  série continue d'initier de nouvelles questions plus qu'elle ne s'essaye à des esquisses de réponses. Le téléspectateur s'accroche à ces maigres indices et se console en songeant que la fin approchant, les mystères finiront par s'éclaircir. En attendant, Ashes to Ashes prend un plaisir certain à nourrir nos doutes et à jouer avec notre rationnalité.

Sam Tyler. Gene. Tout tourne en rond, avec comme accélérateur constant le DCI Keats : ses interventions suivent pourtant un schéma dont on ne perçoit pas encore réellement le but. Il demeure omniprésent, s'immisçant dans le fonctionnement de l'équipe, en devenant un rouage familier malgré l'hostilité toujours affichée par Gene. Keats demeure un élément central, devenu en quelques épisodes un point de passage presque obligatoire pour les différents membres qui n'hésitent plus à venir lui confier leurs derniers états d'âme. La collaboration bureaucratique qu'il a installée avec Chris commence d'ailleurs à porter ses fruits. Le sauvetage de carrière qu'il lui apporte, comme une faveur, en fin d'épisode n'est que le parachèvement d'un travail de sape qui se poursuit depuis plusieurs épisodes. Les fruits que Keats en récoltent en sont pourtant hautement symboliques : ce titre de "Guv" qui échappe des lèvres de Chris, qualité intrensèquement associée à Gene, apparaît presque comme un signe annonciateur d'un coup d'Etat à venir. D'ailleurs, tout cela conduit le téléspectateur à s'interroger: quelles sont les véritables intentions de Keats ? Cherche-t-il à priver Gene de l'appui de son équipe, simplement à l'isoler, ou entend-il se substituer à lui en exerçant sa propre influence sur ses hommes ? Veut-il le remplacer ou bien seulement le faire tomber ?

La mise en scène excessive de cette part de mystère entourant ce nouveau personnage nourrit les doutes du téléspectateur. Signe de la progression de son immixtion dans l'équipe, Alex en vient même à se confier indirectement à lui au détour d'un café. Sans essayer de lui présenter la complexité de son univers, elle lui parle cependant à mots couverts de certaines de ses préoccupations, notamment de ce cadavre de policier qui la hante. En d'autres temps, c'est auprès de Gene qu'elle aurait cherché un réconfort ; mais, actuellement, son supérieur occupe plus la case "suspect" que celle du confident.

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Bilan : L'épisode propose une histoire intéressante, chargée de parallèles symboliques sur l'infiltration et l'immersion dans de nouveaux univers, à la portée métaphorique mythologique qui n'est pas négligeable. Keats poursuit son insatiable travail pour étendre son influence au sein de l'équipe, Chris et Alex étant ses deux cibles privilégiées au cours de cet épisode. Mais, pour le moment, l'enjeu derrière tout cela demeure flou ; les mystères s'épaississent sans pour autant proposer la moindre réponse. Reste une histoire prévisible, mais plutôt prenante et agréable à suivre.


NOTE: 7,5/10

24/04/2010

(UK) Ashes to Ashes : series 3, episode 3

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Ce troisième épisode confirme la tonalité prise par cette nouvelle saison de Ashes to Ashes. Au-delà de la volonté de nous apporter des réponses en résolvant la partie mythologique de la série, les scénaristes semblent vouloir prendre le temps d'explorer chacun des protagonistes qui ont fait la franchise. De façon très similaire à l'épisode précédent consacré à Shaz, celui-ci plonge Ray au coeur d'une crise qui va lui permettre de révéler une partie de lui-même encore inconnue du téléspectateur. Si l'exposé de cette nouvelle introspection pèche, par moment, par excès de maladresses, elle a le mérite de faire prendre de l'épaisseur à un entourage qui était resté pendant deux saisons quelque peu en retrait, derrière le duo central composé par Alex et Gene.

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C'est une intrigue policière encore une fois particulièrement classique, ne comportant aucune surprise, qui va servir de fondation pour renouveler et explorer sous un jour nouveau la personnalité de Ray. Après le serial killer de la semaine précédente, l'équipe se retrouve cette fois confrontée à un "serial arsonist" (un incendiaire), avec, à gérer en toile de fond, la pression particulière générée par une période électorale potentiellement explosive, qui va voir la confirmation de Margaret Thatcher au poste de premier ministre britannique. Il convient d'ailleurs de souligner l'effort de reconstitution du contexte politique de l'époque réalisé dans cet épisode. Les scénaristes choisissent de l'exploiter en l'intégrant directement à l'intrigue du jour, en se permettant un parallèle plutôt habile et très opportun. La mise en scène du traumatisme d'un soldat vétéran de la guerre des Malouines trouve en effet logiquement un écho particulier dans ces images d'archives de la ré-élection de la Dame de Fer, qui bénéficia de ce conflit pour restaurer son image et gagner les élections législatives de 1983.

La pression mise par la hiérarchie policière est une nouvelle fois symbolisée par l'omni-présence du DCI Keats, qui continue de mettre en exergue les doutes de chaque membre de l'équipe, dans le but avoué de les placer en porte-à-faux par rapport à Hunt, cherchant à rompre ce lien de loyauté particulièrement intense qui lie tous les subordonnés à leur chef. Il s'intéresse aux investigations d'Alex, qui, après avoir contacté Manchester, continue de s'interroger sur la mort de Sam Tyler. Il recrute Chris pour se plonger dans les vieux dossiers incomplets d'anciennes affaires résolues de façon un peu bancale. Mais, c'est sur Ray qu'il va focaliser son attention au cours de cet épisode.

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Le dernier incendie en date aurait pu trouver une issue fatale si Ray n'avait pas eu le courage de pénétrer dans le bâtiment en flammes d'où des cris s'élevaient... mais aussi si les pompiers n'étaient pas ensuite intervenus pour assurer le sauvetage du policier un peu trop téméraire et de la victime. Et plus précisément, c'est un pompier qui se détache pour embrasser une stature de héros, Andy Smith. Jeune homme a priori sans histoire, ne nourrissant pas d'ambition particulière de sortir ainsi du lot, mais manifestant un professionalisme et une compétence à saluer. Ray se prend instantanément d'amitié pour lui. Plus qu'une sincère reconnaissance, le policier expresse une véritable admiration pour le pompier et la mission qu'il remplit chaque jour. Seulement, au fil de l'enquête qui progresse peu à peu sur l'auteur des incendies, à la suite d'un témoignage, les soupçons de Gene et d'Alex se tournent vers cet opportun sauveur.

Il est difficile de ne pas ressentir quelque frustration à voir Ashes to Ashes opter invariablement pour une facilité qui finit, parfois, par être un peu ennuyeuse, dans la construction de ces intrigues policières. Un serial arsonist avec un passé militaire est du pain béni pour tout psychologue. Cela offre ainsi l'occasion à Alex d'enfoncer aisément un certain nombre de portes ouvertes sur l'état mental du jeune homme, tous les voyants clignotant pour indiquer "post traumatic disorder". Si l'affaire en elle-même a une portée somme toute très anecdotique, elle mérite cependant d'être saluée en raison de la scène qui va la conclure, d'une intensité et d'une force impressionnantes.

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L'affaire Andy Smith va prendre un tour plus tragique et personnel en raison de l'infidélité de son épouse. En dépit du fait que, dans la droite ligne du reste de l'intrigue, cet élément saute trop rapidement aux yeux du téléspectateur, en revanche, il va permettre une confrontation entre la police et un Andy devenu suicidaire, souhaitant s'immoler avec sa femme. Mais plutôt qu'une intervention clinique d'Alex, ou une charge de Gene, c'est un échange, d'où perce un désespoir existentiel ne pouvant laisser le  téléspectateur indifférent, qui s'initie avec Ray. De la part d'un policier qui nous avait plutôt habitué à des réflexions pas très fines sur le sens de la vie, il délivre ici un exposé d'une rare authenticité, basé sur sa propre expérience. C'est une autre facette du personnage, à laquelle le téléspectateur n'avait jamais été confronté. Si ce cri de détresse est volontairement mis en exergue pour mettre en confiance Andy et empêcher l'irréparable, on sent bien que Ray parle d'une frustration qui lui est familière et d'une insatisfaction chronique sur le sens de sa vie qu'il analyse avec beaucoup de lucidité.

C'est donc une parenthèse intéressante ainsi offerte au personnage, qui s'affirme et s'émancipe de la tutelle de Gene. Au-delà de sa volonté de créer des divisions au sein de l'équipe afin d'isoler Gene, Keats semble chercher à mettre chaque membre face aux doutes qu'il a enfouis, les forçant à se confronter à ce qu'ils sont vraiment. Car cette storyline, comme la semaine précédente avec Shaz, permet à Ray de faire la paix avec une partie de lui-même. L'émanicipation voulue par Keats n'est pas passée par une opposition directe à Gene, ni par un éclatement de l'équipe, mais elle a permis au personnage de Ray de se réaliser pleinement. N'est-ce pas le sens du thème de Life on Mars que l'on entend en fin d'épisode lorsque la caméra se concentre sur lui ?

Si la finalité de l'épisode est appréciable, la téléspectatrice que je suis gardera cependant une impression un peu mitigée de l'épisode. On peut en effet reprocher le manque de subtilité de cette quête introspective. Les scénaristes usent de ficelles relativement grosses pour relater leur histoire : des suggestions de Keats jusqu'au traitement de l'intrigue en elle-même, tout apparaît si évident au téléspectateur, trop explicitement mis en avant pour ne laisser de place à aucune nuance possible. Dans ces moments-là, Ashes to Ashes m'évoque justement ces séries des années 80, au scénario divertissant, mais calibrées à l'excès. Je ne sais pas à quel point cet effet est recherché par les scénaristes ; mais, aux yeux ascérés du téléspectateur moderne, cette tendance est parfois un peu trop exacerbée.

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Bilan : Un épisode introspectif consacré à un autre membre de l'équipe : après Shaz, voici une storyline destinée à mettre en lumière le personnage de Ray. L'intention est louable, la conclusion est intense et marquante, mais l'intrigue souffre d'un excès de classicisme, se situant sur des sentiers scénaristiques trop souvent empruntés par les fictions. A noter cependant un effort de reconstitution du contexte politique de l'épisode, avec une mise en parallèle intéressante sur les conséquences de la guerre des Malouines : d'une part un vétéran dont la vie est brisée, d'autre part une femme politique à qui le conflit profitera pour rempoter les élections nationales. 


NOTE : 6,75/10

10/04/2010

(UK) Ashes to Ashes : series 3, episode 2

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Après un épisode introductif des plus efficaces, permettant de poser les enjeux de la saison, ce deuxième épisode retrouve la construction narrative classique de Ashes to Ashes : une réflexion sur les personnages occasionnée par une enquête policière, dont l'intérêt n'est pas dans une originalité quelconque, mais plutôt dans ce qu'elle insuffle à la dynamique de groupe, le tout saupoudré d'un soupçon de mythologie, qui reste pour le moment en arrière-plan - nous n'en sommes qu'au début de la saison.

La thématique globale de l'épisode propose une réflexion sur l'idée d'appartenance à une équipe, déclinant cette idée à plusieurs niveaux : à travers l'intrigue du jour, plutôt de transition, qui se saisit de l'opportunité de faire prendre un peu de relief au personnage de Shaz ; mais aussi par le biais de l'attitude d'Alex, qui s'intéresse trop au passé, en se concentrant sur la destinée de Sam Tyler.

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L'enquête policière du jour transpose dans les années 80 une intrigue très appréciée des scénaristes des cop shows modernes,traitant du cas d'un serial killer. Une affaire qui commence de façon un peu artificielle et qui ne se départit jamais de l'impression qu'elle est un prétexte pour occuper, mais surtout faire réagir, les différents personnages. Car, si Ashes to Ashes délaisse un peu le caractère irréel et assez déconnecté qui avait prévalu au cours du premier épisode, ce deuxième se concentrant, à partir de bases plus rationnelles, sur l'intrigue du moment, elle rappelle constamment que les enjeux majeurs sont ailleurs, avec l'omniprésence du DCI Keats, en arrière-plan, qui, de manière insidieuse, s'efforce de miner la solidité et la loyauté des différents membres composant l'équipe constituée autour de Gene Hunt.

L'attente du téléspectateur étant focalisée sur des détails ou des références plus cryptiques, à connotation mythologique, il est logique que l'intrigue policière paraisse doucement ronronner. Pourtant, je confesse prendre toujours beaucoup de plaisir à observer toutes ces personnalités dissemblables et hautes en couleurs intéragir. Ashes to Ashes est parvenue à créer une ambiance atypique, profitant de son cadre temporel particulier, qui lui est très personnelle et donne la part belle aux personnages sur l'intrigue en elle-même. Marquant un fort contraste avec les fictions policières déshumanisées aux scenarii cliniques qui ont fleuri dans le paysage sériephile au cours de la dernière décennie, il se dégage de cette dynamique propre à la série quelque chose de chaleureux, qui lui permet de compenser des enquêtes aux ressorts par trop anecdotiques. Encore une fois, l'affaire du jour ne fera exception à cette règle.

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Une main coupée du cadavre d'une jeune femme est envoyée à la police. Loin de tergiverser, Alex active instinctivement ses réflexes de psychologue pour s'improviser apprentie profiler, et surtout orienter l'enquête vers l'idée qu'il n'y aurait pas une seule victime, mais qu'il convient de rechercher si le tueur n'a pas déjà sévi. A partir d'éléments forts réduits, l'enquête progresse de façon finalement très rapide, en grande partie en raison des circonstances - le meurtrier accélère ses rituels macabres - et de la vivacité d'esprit d'Alex (qui n'est pourtant pas infaillible, ce que l'épisode rappelle opportunément). Cette progression accélérée, par paliers, est aussi le symptôme d'une construction somme toute très bâteau, qui ne recule pas devant le recours à certaines facilités scénaristiques. Non que l'on en tiendra rigueur à l'ensemble : en dépit de son cadre et la fibre nostalgique sur laquelle elle aime jouer, Ashes to Ashes n'est pas une série policière.

Cette affaire va surtout être l'occasion pour Shaz de s'illustrer. Douce Shaz, toujours en retrait, personnage féminin et effacé dans ce monde machiste et misogyne que constitue leur équipe. Elle n'a pas le caractère ou l'assurance d'Alex, qui bénéficie du fait qu'elle s'est forgée deux décennies plus tard, mais elle est une digne représentante de son époque. Pour une fois qu'elle se retrouve sur le devant de la scène, c'est évidemment que quelque chose vient enrayer cette apparence lisse que Shaz présente généralement. Elle doute de sa place au sein des forces de police, cherchant sa voie. Finalement, le cas du jour va prendre des connotations quasi-initiatiques, consacrant et consolidant la jeune femme dans l'équipe. Alors qu'elle veut démissionner, c'est elle qu'il va falloir envoyer sur le terrain pour coincer le tueur. Non seulement prend-elle des risques, mais elle est également contrainte de jouer les "femmes d'action". Se substituant symboliquement à Alex qui, depuis son arrivée, avait toujours endossé ce rôle en rupture avec les moeurs traditionnelles de l'époque, Shaz se démarque ainsi de l'ombre de celle qu'elle considère presque comme un mentor. Si le happy end paraît peut-être un peu trop beau à l'écran, avec une Shaz qui fait la paix avec elle-même, c'est aussi parce que l'enjeu de cette réflexion identitaire se situait surtout à un autre niveau : en coulisses, c'est la pérennité et l'unité de l'équipe, sur laquelle Gene Hunt exerce son influence, qui sont remises en question.

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Car dans un épisode où la mythologie s'inscrit en retrait par rapport au premier, Keats semble s'exercer à un étrange jeu. Tout en agissant en parfait "policier des polices", s'intéressant aux cas au cours desquels l'unité aurait dérapés, oubliant la loi pour un prétexte ou un autre, son objectif premier paraît d'être une source de division. Les soupçons qu'il a, sans avoir eu l'air d'y toucher, introduits chez Alex ne sont qu'un premier pas. Lorsqu'il croise une Shaz en plein doute, un soir, seule encore à travailler au commissariat, il l'encourage à partir sans en prononcer formellement les mots. Cela souligne bien sa volonté de dissoudre toute cette équipe très - trop ? - soudée autour d'un leader charismatique auquel elle est entièrement dévouée. L'évolution de la storyline de Shaz est particulièrement révélatrice du fait que tout cela n'est que lutte d'influence entre Keats et Hunt. Après toutes les émotions provoquées par son face-à-face avec le serial killer, c'est dans les bras de Gene Hunt que, instinctivement, Shaz vient se réfugier lorsque ses collègues la rejoignent. C'est encore une fois Gene qui l'a fait changer d'avis et revenir sur sa démission. L'épisode, tout en se concentrant sur le personnage de Shaz, ne fait ainsi que consacrer, indirectement, le rôle central et déterminant de Gene.

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La même dynamique se retrouve dans les réflexions d'Alex, qui se concentre aussi indirectement sur son patron en s'interrogeant sur la mort de Sam. Cette dernière, se posant peu à peu en fil rouge dont la résolution bouclerait tous les mystères de l'univers de la franchise, ramène inexorablement l'équipe à Manchester, à un passé qu'Alex ne connaît qu'à travers les propres dires de Sam lors de son retour dans le présent. L'ambivalence de Gene, le refus d'évoquer à nouveau cette mort... les scénaristes passent l'épisode à forcir le trait d'un mystère qui peu à peu s'épaissit, sans que la moindre progression concrète n'ait lieu. Les recherches d'Alex ne sont pas secrètes. Il est bien difficile pour le téléspectateur de cerner et de se positionner par rapport à cet intrigant jeu du chat et de la souris auquel elle joue avec Gene Hunt. Pour le moment, la série pose ses pièces une à une, sans se presser, se contentant de maintenir l'attention du téléspectateur sur une histoire qui aura forcément une portée déterminante.

D'ailleurs, sur un plan purement mythologique, si l'épisode fonctionne dans un cadre plus rationnel que le précédent, il ne se départit cependant pas de quelques hallucinations ou rappels que nous ne sommes pas dans une série policière au sens classique du terme. La série distille des indices, propose des énigmes pour le moment insolubles... Elle pique la curiosité de façon presque anecdotique, sans que nous ayons la possibilité de progresser dans ce puzzle qui se dresse devant nos yeux. L'aspect que je préfère dans ce teasing au long cours, c'est la façon dont est utilisée la bande-son de Ashes to Ashes : aucune chanson n'est choisie au hasard, elles cadrent toutes avec les enjeux et chacune renvoie un message particulier. Et quand le téléspectateur entend retentir un bref extrait de Life on Mars en croisant le regard de Shaz à la fin de l'épisode, il ne peut s'empêcher de tendre l'oreille et d'observer l'écran de façon plus intense, cherchant pour le moment vainement des réponses aux questions qui se bousculent dans sa tête.

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Bilan : Episode plus classique que le précédent, l'enquête policière n'en est qu'un cadre prétexte. L'enjeu réside dans le développement d'une thématique forte, celle de l'appartenance à un groupe : idée autour de laquelle tout semble tourner et qui s'impose avec beaucoup de force, se révélant face aux agissements du personnage trouble de Keats, mais sur laquelle pèse également l'ombre de la mort de Sam Tyler. Ashes to Ashes distille ses éléments mythologiques au compte-goutte, elle a toute une saison pour apporter des réponses aux interrogations qu'elle prend plaisir à susciter chez un téléspectateur qui n'ose plus garder de certitudes sur cet univers. Nous ne sommes pas pressés, il faut savourer cette dernière ligne droite.


NOTE : 7,5/10

02/04/2010

(UK) Ashes to Ashes : une dernière saison pour résoudre ces énigmes temporelles ?


On y est ! Je ne vous cache pas mon excitation ; certains téléphages auront attendu des réponses aux mystères temporels relatifs à une île perdue, mais pour moi, ce premier semestre 2010 sera marqué par les réponses à une autre énigme temporelle ! Car ce soir débute un bien beau week-end en terres sériephiles britanniques avec, tout d'abord, la reprise de Ashes to Ashes, le spin-off de Life on Mars, qui nous revient pour sa troisième et dernière saison. L'occasion aujourd'hui d'évoquer un peu la série ; ce qu'elle nous a déjà offert et les attentes suscitées par le series finale de l'an passé.

(J'en profite pour préciser que Ashes to Ashes sera reviewée sur ce blog épisodes par épisodes. Au programme donc, à partir de ce week-end, un menu 100% UK et BBC avec Ashes to Ashes et Doctor Who, histoire de faire honneur à la bannière qui trône en haut de la page.)

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Reprenons au commencement. Spin-off changeant de décennie, Ashes to Ashes va se réapproprier les codes scénaristiques se trouvant à la base de Life on Mars. La transition entre les deux s'opère assez naturellement, car l'héroïne, Alex Drake (Keeley Hawes), n'est pas seulement policière, elle est également psychologue. Et surtout, elle a lu les rapports concernant le "cas Sam Tyler", notamment ceux dans lesquels il a raconté son expérience vécue en 1973 lors de son bref "retour" dans le présent. Ashes to Ashes reproduit le même schéma de départ : placée entre la vie et la mort en 2008, après s'être fait tirer dessus, la jeune femme se réveille en 1981, au sein d'une équipe très familière, composée des mêmes policiers dont parlait Sam. Mais Alex dispose de l'expérience passée de son collègue, ainsi que d'une raison supplémentaire de s'accrocher à sa vie et au présent : elle est la mère d'une petite fille, qui va constituer sa motivation première tout au long des deux premières saisons.

A partir de ce synopsis s'inscrivant dans une directe continuité de son prédécesseur, Ashes to Ashes allait avoir la lourde tâche de trouver un juste équilibre entre la franchise à laquelle elle appartenait et sa propre identité. Encore une fois, prendre le relais de Life on Mars n'était pas chose aisée, pas seulement en raison de sa qualité de "série dérivée". Dans ma review, la semaine dernière, j'avais souligné combien Life on Mars était une série qui fonctionnait grâce à l'attachement de ses téléspectateurs : elle avait réussi à nouer une relation basée sur l'affectif, un des éléments les plus subjectifs et, surtout, des plus volatiles qui soit... Or, c'est cet aspect qui générait l'alchimie faisant de la série, une fiction à part qui s'était imposée avec une telle force dans le paysage télévisuel. Mais il n'existe pas de science exacte pour reproduire un tel résultat, qui est la conséquence directe d'un équilibre fragile entre les personnages, les situations mises en scène, les acteurs, ou encore l'ambiance générale.

Transposer l'action dans les années 80, en remplaçant Sam par Alex et en reprenant les mêmes ingrédients que l'originale, ne garantissait aucunement un succès similaire. C'est sans doute pour cela que Ashes to Ashes commença d'abord par se chercher un peu...

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Ne souhaitant pas reproduire un simple copier-coller de la quête de Sam, dont nous avions été témoin au cours des deux années précédentes, Ashes to Ashes choisissait tout d'abord de pleinement exploiter le fait qu'Alex connaissait l'expérience de 1973 et qu'elle disposait donc déjà d'une théorie pré-constituée sur ces évènements. Réagissant en psychologue, elle déconstruit cette réalité des années 80, s'imposant dès le départ une prise de distance avec cet univers dans lequel elle est embarquée malgré elle. Si bien qu'au cours de la première saison, en sur-analysant l'ensemble et en réduisant les personnages qui l'entourent à des "constructions mentales", Alex rationalise à l'extrême le concept de départ de la franchise. Les doutes, les pointes de folie et d'hallucinations, qui avaient pu plonger Sam dans un tourbillon entre fantastique et folie, s'effaçaient donc derrière la froide rationnalité d'une psychologue qui ne reconnaît pas la vie propre de ce monde des années 80. Cet excès de prise de contrôle sur la réalité, ne laissant presque plus de place au mystère, et présentant comme certaine la théorie d'Alex, selon laquelle, tout cela serait une création de son cerveau comateux, une reproduction mentale due au fait qu'elle a lue les dossiers sur Sam, bouscula un peu l'équilibre traditionnel de la franchise. Life on Mars était faite de mystère, une balade non identifiée, une invitation aux frontières de l'imaginaire, de la réalité et de la science. Ashes to Ashes réduisait cet acquis à sa plus simple expression, ne laissant survivre qu'un seul aspect. Cela explique sans doute les difficultés initiales de la série : à trop vouloir se démarquer et proposer une façon de fonctionner propre, elle se détachait également de ce qui avait fait l'attrait principal de sa grande soeur. La première saison ne fut pas désagréable à suivre, loin de là, et elle eut ses bons moments, mais le téléspectateur garda l'impression qu'il manquait quelque chose au tableau.

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C'est pourquoi l'évolution amorcée au cours de la saison 2 fut particulièrement bienvenue. La série renouait en effet avec ce mélange des genres, remettant en cause les certitudes d'Alex et opérant une redistribution des cartes des plus intrigantes. Plus aboutie que la précédente, sa construction bénéficiait d'un solide fil rouge, avec une affaire de policiers corrompus. Comme dans Life on Mars, les actions d'Alex ont une répercussion sur son état de santé dans le présent/futur, métaphores des problèmes qu'elle y rencontre et qu'elle doit résoudre. Seulement, cette fois, les scénaristes n'hésitent pas à abattre certains pans de la réalité, en brouillant un peu plus les rapports temporels entre les deux époques. La nature même de cet univers où les années 80 ont été recréées devient une question centrale, s'éloignant des froides analyses cliniques délivrées par Alex aux débuts. L'introduction de Martin Summers, un autre patient de l'hôpital, est déterminante et permet à la saison de renouer avec cette zone trouble d'incertitudes, dans laquelle Life on Mars excellait. Au-delà d'une reprise en main du concept même de la franchise, le personnage d'Alex se rapproche également de plus en plus de celui de Sam. Le détachement obsessionnel qu'elle avait mis en place comme mécanisme de défense se fissure peu à peu. Son obsession de rentrer prend le pas sur tout le reste, consciente que tous les obstacles qu'elle rencontre sont des formes de mise à l'épreuve, qui culminent dans un final d'anthologie.

En somme, après une première saison plus clinique et moins intensément humaine que ce à quoi la franchise nous avait habitué, la deuxième renoue avec une tradition de mélange des genres, remettant en cause bien des certitudes et se réappropriant pleinement le concept en renouvelant les questions laissées sans réponse pour le téléspectateur.

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Cela nous conduit évidemment à évoquer ce fameux final de la saison 2. J'ai revu ce huitième épisode dimanche dernier, afin de réactiver mes souvenirs. Il m'a rappelé à quel point l'attente de cette dernière saison fut si insupportable. Concluant les storylines en apothéose sur une série de scènes d'anthologie, Ashes to Ashes nous offrait plusieurs confrontations intenses, d'une part entre Summers et Alex, mais surtout, d'autre part, entre Gene et Alex. Leurs rapports s'étaient dégradés au cours de la saison. La confiance avait disparu, laissant place à une méfiance réciproque, exacerbée du côté de Gene dans ce dernier épisode. La résolution de l'intrigue des flics corrompus, permettant du même coup de mettre Summers hors-jeu, se termine dans une fusillade, où les circonstances conduisent, par accident, son supérieur à abattre Alex par balle. Tout cela constitue le déclic symbolique nécessaire ; l'élément décisif qui permet à la jeune femme de se réveiller du coma dans lequel elle était plongée dans le présent. Sa tâche est accomplie : sa quête d'un retour en 2008, sa volonté de retrouver sa fille... toutes ces obsessions pour lesquelles elle a luttées au cours des deux saisons qui viennent de s'écouler.

Seulement, c'est dans ce moment d'euphorie, qui se présentait comme l'happy end vers laquelle la série toute entière tendait, que les scénaristes choisissent d'abattre le dernier mur de réalité, la dernière séparation existant entre passé et futur/présent. Car Alex, en 2008, retrouve les hallucinations dont elle était devenue coutumière dans le passé. Ces voix lointaines qui lui indiquaient qu'elle était à l'hôpital, dans le coma. Seulement, cette fois, le rapport à la réalité est inversé. Ici, c'est Gene qui l'informe de son état de santé, à travers les écrans d'ordinateurs qui l'entourent : elle est plongée en réanimation dans ces années 80 qu'elle vient juste de parvenir à quitter et Gene se retrouve accusé de l'avoir, volontairement, blessée. Le lien n'est, une nouvelle fois, pas rompu avec ce passé dont Alex, comme Sam, était parvenue à s'extraire. Continuation logique de l'évolution amorcée au cours de la saison, Ashes to Ashes opère une redistribution des cartes des plus bouleversantes. Une seule envie pour le téléspectateur : la suite !

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Bilan : Initialement spin-off hésitant sur l'héritage à accepter en provenance de Life on Mars, Ashes to Ashes aura prouvé la ressource de ses scénaristes, toujours à la recherche de l'équilibre permettant à la série de trouver sa tonalité et son identité. Après une première saison où ne perçait peut-être pas assez cette pointe de folie, ce caractère non catégorisable, si étrange, de la franchise, la deuxième aura bénéficié d'une construction globale plus aboutie, mais aussi d'une réappropriation passionnante et des plus intrigantes des bases de la série. Le final laissait en suspens de nombreuses nouvelles questions qui expliquent la grande attente suscitée par cette saison 3 ; car toutes les réponses nous sont promises, pour ce qui devrait être une vraie conclusion de la franchise.


NOTE : 8/10


Une bande-annonce de cette saison 3 :